Mardi 17 mars

Mardi 17 mars – Lecture Hervé Gasser
Le mardi dix-sept mars, en fin de matinée
Je cherche un antonyme pour indispensable
Qui n’ait pas la lourdeur de non-indispensable
Et traduise la raison d’être confiné
Je trouve : superflu, négligeable, accessoire
Secondaire, inutile et superfétatoire
Dans ma tête une voix dit en ironisant

— On t’a mobilisé en t’immobilisant
 
Le président hier a déclaré la guerre
C’est la guerre, la guerre, la guerre, la guerre
La guerre et celle-là, il faut rester chez soi
S’occuper des enfants, cuisiner des légumes
Mais plus il dit la guerre - il répète six fois
Et plus dans ta carafe augmente le volume
De la voix sournoise, la voix des idées noires

— Encore un coup mon vieux que t’es pas dans l’histoire
Ou plutôt si, t’y es : dans une histoire drôle
Une autre Drôl’ de guerre, au plus un jeu de rôle
Tu prends pas le maquis avec la Résistance
On te prie de faire preuve de résilience
Et de bien mettre en œuvre les gestes barrière
Plutôt que déserter et gagner l’Angleterre

— Arrête, Jean Moulin, ton moulin, ton cinoche
Dit la voix du pékin moyen dans ma caboche
Estime-toi heureux de rester à l’abri
Avec tes deux enfants, ton épouse et ta mère
Et pour toute mission d’épargner la patrie
Par quelques consignes d’hygiène élémentaire

Cette voix qui m’endort, m’apaise, m’assagit
C’est la voix labrador, Ikea et Lodgy
Je n’aime qu’à moitié son style et sa morale
De fonctionnaire à l’éducation nationale
Mais la moitié suffit quand on n’est plus entier
Mes deux voix se relaient dans le même boîtier               
La seconde télécharge une attestation
Sur le site intérieur.gouv.fr
L’imprime au verso d’une feuille de brouillon
Et coche la case des courses nécessaires
 
Le rayon frais de La Vie Claire est presque vide
On a dévalisé tout le papier toilette
Idem à Casino pour au moins trois palettes
De packs de lait – l’ambiance y est bizarroïde
Le vigile à l’entrée qui filtre les clients
Porte un masque anti-pollution noir et des gants
On entre au compte-goutte et puis l’on déambule
Seul au milieu des gondoles réfrigérées
Comme un scaphandrier. On s’entend respirer
On prend les derniers yaourts avec des scrupules
On tire son trolley comme en apesanteur
Et quelque part dans les néons, des haut-parleurs
Dictent le protocole du passage en caisse
Pour se tenir à plus d’un mètre de l’hôtesse

Une réflexion sur “Mardi 17 mars

  1. Quelle écriture.
    Mobilisé en t’immobilisant c’est bien dit.
    Sauf que dans la tête et quand bien même les formulaires, la liberté persiste en respectant les consignes de ne pas propager cette saloperie. Maronron au lieu de faire des discours ferait bien de mettre une blouse n’importe laquelle, des gants et un masque et de se mettre aux côtés des Français.
    Il le fera demain, il aime trop le futur. Le présent, il ne connaît pas.
    Et demain surprise pas de masque, pas de gants.
    Vous êtes malade plus de médicaments, alors comme les autres vous allez souffrir.
    Ma vielle dirais-je tu rêves là !!!, Tu élucubres comme Antoine. 🙃

    Aimé par 1 personne

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